vendredi 23 octobre 2020

Hund en lumière. La Stricte Observance Templière décodée

 

Hund en lumière. La Stricte Observance Templière décodée par André Kervella. Editions de La Tarente, Mas Irisia, Chemin des Ravau, 13400 Aubagne.

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André Kervella poursuit ses recherches sur la Stricte Observance Templière et le projet de son énigmatique fondateur, le baron allemand Carl von Hund und Alten-Grotkau (1722-1776). Avec ce nouvel ouvrage, il apporte de nombreux éléments pertinents qui écartent bien des confusions et éclairent à la fois le personnage et son action maçonnique.

Il commence par rappeler que la Franc-maçonnerie est un produit des luttes entre Stuartistes d’un côté, Orangistes et Hanovriens de l’autre, qui se prolongera dans les tensions entre Jacobites et Hanovriens à l’époque où Hund est conduit à la fondation de la Stricte Observance Templière (SOT) qui, rappelons-nous, sera l’une des deux matrices du Régime Ecossais Rectifié de Jean-Baptiste Willermoz, l’autre étant la Doctrine de la Réintégration de Martinès de Pasqually et son Ordre des Chevaliers Maçons Elus Coëns de l’Univers.


L’un des points litigieux avancés par les détracteurs du baron est la patente sur laquelle il s’est appuyé pour légitimer son action et la création de la SOT. Il est question de mystification, d’imposture, justifiées par l’apparence du document, rédigé dans un langage incompréhensible, un latin modifié. André Kervella se propose de décrypter ce document qui serait en réalité codé. Le déchiffrement est corroboré par d’autres documents, journal intime de Hund, lettre, seconde patente, iconographie…

Il ressort de cette étude minutieuse que la Stricte Observance ne fut pas une création ex nihilo, comme pour tant d’ordres initiatiques.

« Ce n’est pas une pure invention de Hund, affirme l’auteur, qui aurait profité de la crédulité de ses contemporains pour leur proposer un système nourri de sa seule imagination. Sa filiation avec les « Supérieurs inconnus » est bien réelle, à condition de préciser que Marischall ne lui confie aucun écrit substantiel sur la manière dont les jaco­bites en sont venus à emprunter leurs modèles aux traditions plus ou moins argumentées. Tout ce qui précède démontre que c’est à bon droit qu’il se prévaut successivement de sa première expé­rience parisienne de 1743 et de celle de 1751 avec la dévolution de sa patente. »

La SOT apparaît bien comme un projet d’inspiration jacobite avant d’être templier. Les inscriptions templaristes se construisent progressivement « comme une option templière » souchée sur « le milantisme jacobite ».

André Kervella met en évidence le rôle essentiel joué dans cette affaire par des personnalités comme le duc John Erskine de Mar ou encore Marischall qui fera partie de ces « supérieurs inconnus » mis régulièrement en avant par les détracteurs de Hund :

« Le jeune baron de Hund, natif de Saxe, est fait maçon tem­plier à Paris en janvier 1743 dans une loge d’exilés jacobites. Une fois revenu dans ses terres à la fin de l’année, il ne prolonge appa­remment pas son engagement maçonnique. En 1751, le comte Marischall, haut dignitaire écossais entré au service de Frédéric II de Prusse, le contacte pour recréer en Allemagne l’ancienne Province qui existait du temps de Jacques de Molay. Il lui donne une patente codée qui définit sa fonction et ses devoirs. Une petite équipe est alors formée, qui va s’appliquer pendant trois ans à composer des statuts et des règlements inspirés des anciens. Elle veille aussi à fixer les rituels des grades dispensés dans les loges et chapitres. »

C’est peu à peu que le projet politique, jacobite, voué à l’échec, laisse la place au projet maçonnique templier. L’histoire de la SOT est d’une grande complexité. Si des questions demeurent, les sources rassemblées dans cet ouvrage et les analyses de l’auteur permettent un tout autre regard sur Hund et la Stricte Observance Templière. Spéculations et raccourcis, parfois invectives, peuvent laisser la place à une étude raisonnée et éclairante.