dimanche 28 avril 2013

Irène Mainguy, La Franc-maçonnerie clarifiée pour ses initiés. Sur les pas d'Oswald Wirth


La Franc-maçonnerie clarifiée pour ses initiés, le Maître par Irène Mainguy, Editions Dervy.

Après l’Apprenti et le Compagnon, Irène Mainguy achève, avec ce troisième volume consacré au Maître, sa trilogie inscrite dans les pas d’Oswald Wirth sous le titre La Franc-maçonnerie clarifiée pour ses initiés. Cette trilogie révisée de l’œuvre célèbre de Wirth, La Franc-maçonnerie rendue intelligible à ses adeptes, constitue désormais une référence indispensable pour faire vivre les symboles et saisir l’opérativité de rites qui demeurent souvent incompris et non mis véritablement en œuvre.

Irène Mainguy a développé une analyse très fine des écrits d’Oswald Wirth afin de les enrichir par les apports nombreux des dernières décennies de la recherche maçonnique mais aussi par sa connaissance intime de l’initiation qui lui permet de mettre en évidence l’essentiel et d’éviter ainsi au chercheur des éparpillements tentateurs. Dans ce troisième livre, elle approfondit la symbolique du grade de Maître et ce qu’il met en jeu, de fondamental, dans la queste initiatique autour de la question philosophique, éthique et métaphysique que formule ainsi Georges Steiner : « Qui suis-je quand je meurs ? », avec bien sûr en fond, le thème de l’immortalité.

« La pleine possession de la maîtrise maçonnique n’est accessible qu’en vivant un rituel de mort. Celle-ci donne accès à la pérennité de l’esprit, à l’immortalité. Tout être est dans une parenthèse entre la naissance et la mort. Nul ne peut prétendre à une vie éternelle sans avoir préalablement et consciemment accepté de subir pour la surmonter la pourriture du corps et l’obscurité de la tombe. Lorsqu’il est dit que « la chair quitte les os », cela signifie que le voile des apparences a disparu, qui masquait la lumière de la réalité et de la vérité. Désormais seule subsiste la pérennité de l’être. (…)

Se libérer des apparences, c’est accéder à la pérennité de l’esprit et s’affranchir de toutes formes de servilité, d’obséquiosité, d’hypocrisie, de compromissions, d’orgueil du pouvoir, et des vanités de l’avoir. »

En quelques mots, Irène Mainguy inscrit la Franc-maçonnerie dans l’universalité des voies d’éveil, lui restituant tout son sens initiatique, perdu de vue par la majorité. S’extraire de l’avoir et du faire, s’affranchir de l’apparaître, reconnaître la nature vide du moi, simple objet dans la conscience, laisser libre la place pour l’être…

« La tombe d’Hiram, précise-t-elle, peut être considérée comme un athanor dans lequel s’accomplit l’œuvre alchimique. En alchimie, lorsque la phase de corruption est arrivée à son terme, elle libère le germe vivificateur et donne naissance à un nouvel être. »

La maîtrise devrait être une sagesse. Il n’est pas anodin de croiser Marc-Aurèle dans les pages de ce livre.

« L’approfondissement de la maîtrise passe avant tout par la connaissance de soi, ce qui nécessite de cerner et d’analyser la nature de ses conditionnements et les mobiles de son action. Cela demande d’être capable de se défaire de toute forme de partialité et de subjectivité pour être apte à tendre, en toute chose, vers une réelle objectivité.

Une authentique maîtrise de soi conduit à une libération de la pensée par une élévation de l’esprit vers la Lumière et la Vérité, ce qui perfectionne le comportement. C’est l’amour du Bien, du Beau, du Vrai et du Juste qui permet de progresser vers cette ineffable Lumière, celle de son maître intérieur, que chacun doit pouvoir trouver en soi.

Lawrence Hamilton considère qu’au grade d’apprenti, l’homme passe des ténèbres à la lumière : c’est créer. Au grade de compagnon, il apprend à se servir des instruments du travail matériel et moral : c’est diriger. Enfin au grade de maître, il applique la connaissance à sa propre perfection : c’est vivifier. »

Le travail rigoureux d’Irène Mainguy, qui sait laisser la place à la dimension poétique, c’est-à-dire créatrice, de la fonction initiatique, établit un dialogue fécond entre le rituel et la légende, ouvrant ainsi les espaces intérieurs que tout Franc-maçon est invité à explorer.

Editions Dervy, 19 rue Saint-Séverin, 75005 Paris, France.

vendredi 26 avril 2013

La Clé d'or de Jean-Marc Vivenza


La Clé d’or et autres écrits maçonniques de Jean-Marc Vivenza, Editions de l’Astronome.

L’édition de ce petit livre qui tient dans la poche et qui peut ainsi nous accompagner au jour le jour est l’occasion de s’éloigner des polémiques stériles des derniers mois qui secouent les différentes composantes du Régime Ecossais Rectifié, dont l’auteur est un acteur incontournable.

Cet ouvrage propose un ensemble de textes réunis par l’auteur comme un parcours initiatique aléatoire au sein du courant illuministe. Ces travaux sont avant tout pour le lecteur une source de questionnement et d’approfondissement de son rapport au divin en tant qu’homme de désir, de sa queste de la « Clé d’or de l’esprit ».

Dans son introduction, Jean-Marc Vivenza insiste sur la nécessité du silence, préalable à l’initiation et permanence de l’initiation :

« Ne l’oublions pas, avant que de nous immerger dans ces pages, le silence transcende comme la nuit toute image, il est le prélude à tout commencement et à tout aboutissement de l’œuvre, de même que l’oiseau qui prend son souffle et régénère sa vie avant le lever du soleil en est le symbole, il borne le chemin de la remontée à l’évidence, il est recueillement et attention, attente et écoute approfondie ; se donnant comme une « Présence », il est à la fois la source première et terre natale par excellence de la pensée essentielle, le fond originel d’où elle provient, nous donnant de comprendre pourquoi faut-il, pour qu’il puisse éclore en son retrait, que se déchire le voile qui le dérobe habituellement à notre conscience préoccupée par le monde. »

Et de citer Louis-Claude de Saint-Martin :

« Ce n’est que dans le calme de notre matière que notre pensée se plaît ; ce n’est que dans le calme de l’élémentaire que le supérieur agit. Ce n’est que dans le calme de notre pensée que notre cœur fait de véritables progrès ; ce n’est que dans le calme du supérieur que le divin se manifeste. »

Cette hiérarchie ascendante du calme, qui évoque une théophanie du Silence, est une indication précieuse de l’axialité dont nous ne saurions nous éloigner sans tomber dans le bruit dont Saint-Martin tenait à se garder.

L’interrogation ontologique des apparences, de l’Apparaître-même, est au coeur du propos développé par l’auteur. A partir de la question fondatrice que se pose l’être humain confronté à sa relativité, l’incertitude quant à son existence, la réalité de celle-ci, son sens éventuel, Jean-Marc Vivenza explore les possibilités qui s’offrent à nous pour accéder à une libération dont nous avons soif, peut-être par pressentiment, peut-être par une trop grande souffrance devant « un abîme troublant non comblé et irrémédiablement ouvert ». L’interrogation comme voie initiatique – Le cheminement spirituel – La nature des ténèbres – La « science de l’homme » par excellence – Voyez-vous tels que vous êtes – Misère de l’homme au monde – « Memento mori » - L’enseignement de la vertu – Faites place à « l’esprit » - La Clé d’or, titres des textes rassemblés, constituent une indication sur cette exploration à laquelle le lecteur est invité, une exploration qui peut être aussi entendue comme un « transport » :

« Revêtu de l’essentiel, comme l’affirme le Philosophe inconnu, l’homme est transporté dans le séjour de la lumière : « l’homme né pour l’esprit, ne peut jouir de l’esprit qu’en commençant à se faire esprit ; à cette fin, lorsqu’il est prêt, la sagesse le transporte dans le séjour de la lumière où il a pris son origine. »

Que nous délivre comme enseignement cet extraordinaire « transport » ?

Tout d’abord notre identité de nature avec l’esprit ; se faire esprit étant en fait se rendre peu à peu capable d’esprit.

Mais ce transport a pour vertu de nous révéler, également, un certain nombre de lois métaphysiques, dont une que nous pourrions désigner comme étant centrale et qui porte sur le sens profond de la vérité dans son déploiement. Ce transport d’une nature tout à fait surprenante, débouche en réalité sur une clé, une « Clé d’or » capable d’ouvrir la porte du mystère dissimulé depuis l’origine des choses, à savoir celui de notre véritable nature, notre origine première, l’identité essentielle qui nous fonde ontologiquement et en vérité, que nous avons à retrouver par la mise en œuvre du processus de réintégration. »

Cette clé, qui relève de « ce qui demeure », du non-temps, du non-duel, invite à une métaphysique du cœur, du centre, de l’intime, du lieu de la « Présence ».

Ce cheminement autour de la Clé d’or est enrichi de trois appendices, plus maçonniques dans la forme : De l’Être à l’ « Être Suprême »maçonnique – L’illuminisme et la Franc-maçonnerie – L’essence du christianisme transcendant, et d’un bref mais utile glossaire.

Éditions de l'Astronome, L'Étoile D, 9 avenue du général de Gaulle,74200 Thonon les bains, France.