Mahhabone ou la porte de la Grande Loge ouverte afin de révéler les secrets des « Ancients » et des « Moderns » présentation, traduction et commentaires de Joël Jacques, Maison de Vie Editeur.
L’édition de Mahhabone, un document du XVIIIème siècle, injustement oublié, présentant surtout la pratique des maçons irlandais, inédit en France, constitue une opportunité pour saisir la dialectique entre « Anciens Maçons » et « Nouveaux Maçons » et s’approcher du sens interne de l’initiation maçonnique quelque peu perdu. Si le texte est très londonien, particulièrement contextué, parfois déséquilibré, parfois naïf, les commentaires précieux de Joël Jacques, permettent à la fois de lui donner son sens historique et de dégager les dimensions et enjeux philosophiques que la confrontation, pas toujours fraternelle, exacerbe parfois.
Joël Jacques nous éclaire tout d’abord sur ce que sont ces Ancients et comment s’amorça le glissement spéculatif en réponse à l’évolution de la société et plus particulièrement du monde du travail :
« Nous pouvons à présent regrouper l’ensemble afin d’obtenir une image de la mouvance maçonnique la plus archaïque, c’est-à-dire celle revendiquée par les Ancients. Il s’agit d’un regroupement de Frères artisans, praticiens d’un métier et qui disposaient d’une certaine liberté de réunion et de déplacement d’un chantier à l’autre sans avoir les contraintes d’un contrat restrictif. Ils sont rejoints par d’autres compagnons, étrangers au métier et reçus dans la corporation pour leurs qualités et leurs savoirs afin de gérer les intérêts des chantiers, des Loges et de leurs membres dans un environnement économique et juridique de plus en plus complexe. Il s’agit donc bien d’un groupe de maçons Anciens, Libres (Franchisés) et Acceptés (Ancients, Free and Accepted Masons). »
Les Loges de Francs-maçons symboliques ou spéculatifs « n’ont pas été nécessairement constituées autour des métiers de bâtisseur. Ces maçons ne sont pas des constructeurs, pas plus, et c’est leur grande différence avec les « acceptés », qu’ils ne sont systématiquement gestionnaires des intérêts de l’Ordre. » A l’époque, les Loges ne sont pas aussi structurées et formalisées qu’aujourd’hui. Toutefois, nous reconnaissons dans les rituels de l’époque, les traits caractéristiques de ceux d’aujourd’hui.
La Franc-maçonnerie dite « spéculative » se trouve à la croisée de nombreuses influences, celles des Ancients, parfois par adhérence, parfois par distance, celle de la pensée philosophique des libertins et des sceptiques, des premiers regroupements de scientifiques, la pensée rosicrucienne rhénane… Elle bénéficie d’un terreau fertile et d’interrogations fondamentales, de remises en question sociétales inédites. Pour l’auteur, « la Franc-maçonnerie continentale issue des Moderns ne trouve pas directement ses origines chez les bâtisseurs. Sur ce point, à notre avis, la meilleure piste serait l’illuminisme élisabéthain et le rosicrucianisme. » Mais l’auteur reste conscient de l’hyper complexité des interactions humaines et sociétales. Il ne tombe pas dans le piège de chercher une vérité unique. Mahhabone donne à penser et son principal intérêt reste peut-être dans l’approfondissement de la pratique des rituels maçonniques.
Maison de Vie Editeur, 16 boulevard Saint-Germain, 75005 Paris, France.