Le Miroir
d’Isis n°25, année 2018. Clément Rosereau, 54 bis rue d’Angleterre, F-59870
Marchiennes.
Chaque
numéro du Miroir d’Isis est
excellent. Celui-ci ne déroge pas à la règle et propose plusieurs contributions
très importantes.
Parlons tout
d’abord du texte de Pere Sanchez Ferré Orient
et Occident dans la tradition hermétique. Si nous ne partageons pas toute
la vision de l’auteur sur l’Orient, sa réflexion sur l’hermétisme nous semble
très pertinente. Sur la question de l’Orient, rappelons simplement que
l’hindouisme est une création purement politique du colonisateur anglais (le
mot a d’ailleurs été construit à partir de l’arabe) et ne prend pas en compte
le monde complexe et protéiforme des multiples traditions de l’Inde, la plupart
d’ailleurs encore inconnues des occidentaux. Il en est de même du bouddhisme
qui en réalité n’existe pas, il y a de nombreux bouddhismes, y compris en
Occident, fort différents les uns des autres, même si le seul bouddhisme
tibétain, d’ailleurs minoritaire, est médiatisé.
Pere Sanchez
Ferré oppose deux spiritualités, l’une dissolvante, l’autre coagulante, la première
qu’il associe, à tort selon nous, à l’Orient occidentalisé, la seconde à l’hermétisme
occidental, mais l’important est ce qu’il exprime de la spiritualité coagulante :
« La
tradition hermétique occidentale nous propose non seulement d’atteindre l’état
mystique de dissolution dans l’Absolu ou la Grande Âme du Monde, mais également
d’arriver à la fixer. Ce qui revient à dire l’incarnation de la divinité en
nous. Cela demande évidemment l’acquisition d’un corps de lumière. Cependant, c’est
Dieu qui réalisera cette Œuvre en nous, œuvre qu’il nous est impossible de
réaliser sans son intervention. (…)
La première
possibilité, comme nous l’avons vu, suppose que l’âme individuelle réintègre l’Âme
du Monde et disparaisse pour toujours en tant que telle (« redevenir non
né »), car elle va perdre la conscience individuelle. C’est la voie de la
dissolution dans le grand tout universel. La seconde voie consiste à « naître
deux fois », c’est-à-dire à recevoir la vraie initiation (en termes
chrétiens, la bénédiction), qui nous permettra de ne pas nous dissoudre, mais plutôt
d’incarner ou de coaguler le ciel en nous, avec l’aide de Dieu.
Toutefois,
la voie de la dissolution hermétique est, en fait, la première étape de notre
régénération complète. Elle peut mener à la vraie sainteté, ici, dès ce monde,
parce que cette dissolution n’est qu’intérieure. Alors que la dissolution post mortem dans la Mer Universelle
constitue sans doute une libération, mais suppose la perte totale de la
conscience individuelle, le véritable moi. »
Les extraits
de la correspondance de Louis Cattiaux et Emmanuel d’Hooghvorst ou d’écrits de
Louis Cattiaux à ses amis sont une fois de plus d’un grand intérêt. Exemple :
« Pour
comprendre ce que peut être la nature du breuvage d’Immortalité ou Pierre
Philosophale, il faut bien méditer sur les causes de la dégénérescence de l’homme
et sur la Nature même, car il est impossible de connaître le remède sans connaître
la maladie. Lorsque vous mangez du pain, vous êtes nourris, quelles que soient les
dispositions psychiques ou spirituelles dans lesquelles vous vous trouvez, car
alors la nature fait son office et produit ses effets. Seulement, il se produit
ceci, en ce qui concerne le pain des immortels, que c’est lui qui nous digère
et nous transforme en lui, au lieu que pour le pain vulgaire, c’est nous qui le
digérons et le transformons en notre propre substance. »
Egalement au
sommaire ce de numéro, signalons une belle Introduction
à la lecture du Saint Coran par Claude Froidebise, une autre Introduction à l’Alchimie intérieure selon
le Taoïsme de Jordi Vilà i Oliveras, un texte de Catherine de Laveleye
consacré à La Parole perdue selon Henry
Corbin et beaucoup d’autres contributions passionnantes pour, comme nous y
invite en toute urgence Clément Rosereau, « se ruer dans la quête ».