dimanche 13 janvier 2013

Jean Phaure


Le cycle de l’humanité adamique de Jean Phaure, Editions Dervy.
Cette introduction monumentale à l’étude de la cyclologie traditionnelle et de la fin des temps, préfacée par Jacques d’Arès fut publiée il y a quatre décennies.
Le temps cyclique est un temps traditionnel. Il se différencie en ce sens au temps linéaire qui s’est imposé dans les modèles du temps monochroniques des sociétés industrialisées. Jean Phaure (1928-2002) a réalisé, nous dit Jacques d’Arès, « une ambitieuse synthèse de la tradition primordiale considérée dans son « devenir », permettant ainsi une remise en ordre métaphysique et traditionnelle de notions trop souvent éparses. ». Il faut noter les guillemets qui cernent le mot « devenir ». En effet la Tradition demeure, ni elle n’advient, ni elle ne devient mais notre rapport à la Tradition, forme verticale du rapport au savoir, est bien en mouvement. Jacques d’Arès insiste sur le fait que cette synthèse n’aurait pu aboutir sans le sens poétique de Jean Phaure : « Quand aux facultés de synthèse, bien que l’exemple ne puisse être érigé au rang de loi, je considère que Jean Phaure les tient de son tempérament de poète et d’artiste. L’intuition esthétique – cette Aisthésis célébrée par Paul Le Cour – est en effet indispensable pour compléter et affiner les résultats de l’analyse rationnelle. ».
Cet ouvrage « non conformiste » est articulé autour de plusieurs axes que dégage Jacques d’Arès dans sa préface :
-L’ordonnancement du cosmos selon des lois dont certaines échappent encore à la science mais pas à la tradition.
-Mythes, légendes et cosmogonies rendent compte du mouvement de l’humanité vers et à travers l’Esprit en quatre phases.
-Microcosme et macrocosme connaissent une organisation cyclique.
 
Le voyage initiatique à travers les cycles est pour Jean Phaure un voyage de l’avoir à l’être, soit de la dualité à la non-dualité.
Le travail de synthèse de Jean Phaure, obéit lui-même à une approche cyclologique. Il fut repris plusieurs fois afin de s’étoffer, s’enrichir, se préciser jusqu’à sa version finale. Guénonien éclairé, Jean Phaure fut aussi un proche de Paul Le Cour. Il emprunta le meilleur de René Guénon et de Paul Le Cour, deux styles et deux pensées très opposés, pour réaliser sa synthèse, rigueur et sens de l’enchantement. Il fut sans doute aussi influencé par Raoul Auclair, malheureusement oublié et Simone Weil. Poète et métaphysicien (il y a ici quelque chose du pléonasme), Jean Phaure a su se dégager des enfermements et des condamnations de René Guénon, pour ne pas rejeter la mystique. Son travail va aussi converger avec celui de Vlaicu Ionescu qu’il fera publier en France.
Dans toute étude cyclologique, il y a une dimension prophétique marquée par le risque de confusion. La prophétie ne doit pas être entendue comme prédiction mais comme plan inspiré, non comme annonce d’événement mais comme orientation vers une réalisation spirituelle. L’interprétation d’une cyclologie ne doit pas instituer une nouvelle causalité linéaire qui éloignerait du but et nous ferait retomber dans la lourdeur dualiste. La recherche d’un « âge d’or » commun à toutes les traditions, se perd dans les sens historique et temporel. Il s’agit d’accéder à un état permanent, hic et nunc. Finalement, une cyclologie est une pragmatique initiatique. Elle modifie notre rapport au Réel et vise à nous extraire des cercles illusoires de la représentation. C’est un appel au silence. Si le monde est une matière à travailler alchimiquement, il est porteur d’un entendement pour qui sait lire et voir à travers les cycles un processus de réintégration, réalisation, reconnaissance, de l’état originel et ultime.
A travers toutes les traditions et révélations, Jean Phaure dégage une structure unique de réalisation qui s’entend à la fois pour « son temps » et pour tous les temps. Il nous parle d’une permanence de l’être et il convient de ne pas l’oublier, le risque de superstition apocalyptique restant puissant comme nous avons pu le voir une fois de plus en 2012.
Cette réédition est donc bienvenue pour se réapproprier une dimension traditionnelle souvent malmenée. Le message synthétique de Jean Phaure met de fait le lecteur à distance et l’invite à une méta-analyse. Jacques d’Arès parle de ce livre comme d’un « plaidoyer pour l’Esprit ».
Editions Dervy, 19 rue Saint-Séverin, 75005 Paris, France.

samedi 5 janvier 2013

Les deux grandes colonnes de la Franc-maçonnerie


Les deux grandes colonnes de la Franc-maçonnerie par René Désaguliers, collection Renaissance Traditionnelle, Editions Dervy.
Ce texte de René Désaguliers, pseudonyme de René Guilly (1921-1992), fut publié pour la première fois en 1961. Après deux rééditions, il était devenu indisponible, une quatrième édition, enrichie, s’imposait. René Désaguliers révolutionna la recherche maçonnique historique en remontant aux sources les plus anciennes sans se contenter des commentaires plus ou moins appropriés. Son influence sur la recherche en histoire maçonnique fut considérable et permit de très nombreuses découvertes par des démarches rigoureuses. Une véritable école d’historiens prit naissance grâce à son travail exigeant.
Dans ce premier texte consacré aux colonnes, d’autres suivront, notamment sur les trois colonnes Force, Sagesse, Beauté, il pose la question de la place véritable des colonnes et des conséquences de leur inversion dans certains rites. Il semble que l’origine de l’inversion des colonnes se trouve dans l’usage fait initialement des noms Boaz et Jachin qui auraient pu être donnés ensemble au grade d’apprenti avant de qualifier différemment les deux premiers grades.
L’analyse de René Désaguliers vide de leur sens les querelles ésotériques sur la signification de l’emplacement des colonnes. Il invite à la prudence et au bannissement des jugements hâtifs :
« Tout d’abord, et c’est un point nullement négligeable mais dont nous ne tirerons aucune conclusion pour l’instant, l’élaboration du système occultiste construit autour des deux colonnes est très récente et son introduction dans la franc-maçonnerie paraît due avant tout à l’influence d’Oswald Wirth. Ce dernier, il est vrai, avait recueilli la tradition des auteurs occultistes français du XIXème siècle, et entre autres de J.M. Ragon. (…)
Il faut surtout observer que toute construction occultiste sur les deux colonnes aurait absolument exigé au préalable la mise au point définitive, celle que nous venons de tenter, du problème de la position des colonnes. Car, et c’est regrettable à beaucoup d’égards, la confusion qui règne sur ce sujet a gravement contaminé le système alchimique fondé sur les colonnes, dont il n’est pas exagéré de dire que désormais peu d’esprits s’y retrouvent. »
Enfin, René Désaguliers revient sur le sens des mots Boaz et Jachin et dénonce la tentation de la « laïcisation » du sens, rappelant « l’origine religieuse du symbolisme maçonnique ».
La clarification nécessaire qu’apporte ce travail permet de repenser le Temple et son opérativité sur des bases saines.
Editions Dervy, 19 rue Saint-Séverin, 75005 Paris, France.

mardi 1 janvier 2013

Hermétisme chrétien


La Véritable et Parfaite Préparation de la Pierre Philosophale enseignée à un amy par un Chevalier Rose-Croix, anonyme daté de 1642 présenté par Fred MacParthy, Sesheta Publications.
Ce texte fut publié à Breslau en Pologne en 1710 par Samuel Richter sous le nom de « Sincerus Renatus », protestant qui étudia longuement Paracelse et Boehme et influença Goethe par son hermétisme chrétien. Ses travaux alchimiques furent repris dans l’Ordre des Rose-Croix d’Or d’ancien Système. Samuel Richter dit ne pas être l’auteur de ce texte et en effet il existe une version manuscrite datée de 1642. C’est cette version plus ancienne qui est publiée ici, Samuel Richter ayant modifié le texte initial dans son édition. Ce texte fut également publié autour de 1660 par Nicolas de Locques (1638-1715).
Dans son introduction, Fred MacParthy aborde la question de l’évolution des anciennes fraternités Rose-Croix des XVIIème et XVIIIème siècles à travers l’évolution de leurs règles et aussi de leur rapport à l’alchimie et notamment de la question du rapport entre Dieu et la Nature.
Appelé aussi « l’ouvrage des Pauvres par rapport au peu de Dépense », titre significatif, le texte publié traite de l’opérativité aussi bien selon « la Voie des Anciens » que selon « la Voie des Modernes ».
Sesheta Publications, 2 bis rue Damiette, 76000 Rouen, France.