Le mystère de l’Eglise intérieure
de Jean-Marc Vivenza, Editions La Pierre Philosophale.
Une
nouvelle fois, Jean-Marc Vivenza vient explorer la théosophie saint-martinienne
en sa dimension la plus intime. Comme souvent dans les travaux de Jean-Marc
Vivenza, il y a deux livres en un, le premier fait d’une mise en perspective ou
en écho de textes de référence et en premier lieu ceux du Philosophe Inconnu,
Louis-Claude de Saint-Martin, le second constitué d’un appareil de notes où
domine le regard origéniste de l’auteur.
Ce
livre prolonge et approfondit trois livres précédents de l’auteur, disponibles
chez le même éditeur : L’Eglise et
le sacerdoce selon Louis-Claude de Saint-Martin – Le culte « en
esprit » de l’Eglise intérieure et Pratique
de la prière intérieure. Ce quatrième volume aborde la dimension métaphysique
et ontologique de l’œuvre du Théosophe d’Amboise. Au centre de sa doctrine,
cette question : « faire naître
Dieu en nous », fondement d’une mystique de l’interne ou de l’intime
qui n’est pas sans rappeler la divinisation de l’être humain chère à
l’orthodoxie.
Il
est d’abord question du mystère de « l’Eglise intérieure », cette
« communauté de lumière » qui, nous dit Jean-Marc Vivenza, « a
été révélée au Christ lors de sa venue en ce monde, quoique cette assemblée
soit demeurée cachée et préservée bien avant l’Incarnation, et dans laquelle se
trouvent conservées la vraie religion, la pratique du culte, la prière
silencieuse d’abandon, l’oraison passive de recueillement, et, principalement,
les connaissances mystérieuses réservées aux élus de l’Eternel ».
Il
existe ainsi un « dépôt primitif de toutes les révélations » à la
fois source et phare des petits et grands mystères et, avec plus de précision
encore, un « double mystère qui
nous lie aux choses divines, et qui lie les choses divines avec nous »
(…) qui débouche sur la réalisation d’un troisième mystère, le « Grand
Mystère », qui est celui de la « génération de Dieu en nous »,
par un processus méta-ontologique absolument saisissant, dont la sublimité
relève des plus hautes régions de l’Esprit », ces trois mystères formant
une « triple Croix » à
laquelle, d’ailleurs, correspond également une « triple couronne ». »
« Ce
« Grand Mystère » ajoute Jean-Marc Vivenza, ouvre donc sur une
dimension proprement « ontologique », car en fait l’ordre au sein
duquel se situent les questions relatives au sacerdoce « en esprit »,
participe d’une région où « l’Être » et le « non-Être »
entretiennent, depuis toujours, un rapport étroit, ce qui a pour conséquence de
placer l’âme au cœur d’un enjeu considérable qu’il n’est pas évident de déceler
derrière le rideau opaque des apparences de la réalité matérielle. »
Cette
approche non-duelle et même, in fine, ni duelle ni non-duelle, pointe vers la
finalité de toute initiation, de toute tradition.
La
pensée de Jean-Marc Vivenza au sujet de cet impensable se déploie en trois
grands moments : La substance du
mystère – La doctrine de l’Eglise intérieure – La naissance de la Divinité dans
l’âme à partir du « néant ». Les nombreuses annexes proposent des
regards croisés sur ce sujet essentiel, ceux d’Origène, de Lamennais, de Franz
von Baader de Jacob Boehme, de Saint-Martin bien sûr.
La
matière est dense, les entrées nécessairement multiple, pour un unique objet :
la Réintégration, un unique moyen, le Silence. La voie saint-martinienne
appelle, avec l’élégance et la discrétion insistante si coutumières dans l’œuvre
de Louis-Claude de Saint-Martin, à un renversement, une conversion, un saut (et un sceau) salutaire dans le vide qui n’est que plénitude.