Robert Ambelain, le théosophe clandestin
Serge Caillet
Edition La Tarente, Mas Irisia, Chemin des Ravau, 13400 Aubagne – https://latarente.fr/
Trop souvent, nous entendons des jugements à l’emporte-pièce à l’encontre de Robert Ambelain, y compris de la part de personnes qui se présentent comme historiens, ce qui traduit une méconnaissance de la véritable nature de la scène ésotérique et de ses mouvements. Ce livre permettra à chacun de mieux comprendre l’homme, complexe, et ses actions, souvent déterminantes, pour préserver certains courants traditionnels occidentaux.
« A la charnière des amis de Papus et d’une troisième génération de Compagnons de la Hiérophanie, qui lui doit beaucoup, la carrière et l’œuvre de Robert Ambelain sont tout à fait exceptionnelles, annonce Serge Caillet. Travailleur infatigable, continuateur des rénovateurs de l’occultisme de la Belle Epoque et des maîtres de l’illuminisme du siècle des lumières, héritier aussi des grands ancêtres de la race des Cornelius Agrippa, des Jean Trithème et des Abramelin, ce « meneurs d’extravagants » a maintenu leur héritage, à sa façon singulière et efficace, dans les écoles mystériques qu’il a restaurées, y compris et d’abord dans la clandestinité, avant leur retour en pleine lumière, de la Rose-Croix, du martinisme, des chevaliers maçons élus coëns, de l’Eglise gnostique et des rites occultistes de la franc-maçonnerie, particulièrement de Memphis-Misraïm. »
Serge Caillet souligne, et c’est de première importance, la dimension libertaire de l’œuvre de Robert Ambelain qui ne se laissa jamais inféoder. C’est un véritable questeur, ce qui est rare, un praticien exigeant des disciplines traditionnelles, principalement l’astrologie, la géomancie, la théurgie, n’hésitant pas à remettre en question ses propres travaux quand ils lui semblent finalement invalides. C’est aussi un guerrier, un guerrier de l’esprit et un guerrier tout court comme il l’a démontré pendant l’occupation nazie, maintenant en activité quelques sociétés initiatiques devenues clandestines.
Le portrait dressé par Serge Caillet est très étayé et particulièrement lucide. Robert Ambelain a parfois développé des thèses ou des positions intenables. Avec le recul de quelques décennies, l’œuvre visible, riche de sa diversité, apparaît parfois pleine de contradictions ou de contre-sens, pourtant tous ceux qui l’ont approché, reconnaissent en Robert Ambelain une figure majeure du monde initiatique du siècle dernier, non en raison de ses écrits mais en raison de ce qu’il fut, de ce qu’il réussit à établir et valider par la pratique des sciences traditionnelles. Il avait un sens très aigu de l’élaboration et de la mise en œuvre des rituels. Il fut sans aucun doute un véritable théurge quitte parfois à s’engager sur des sentiers épineux.
Parce que Robert Ambelain connut à peu près tous ceux qui comptèrent au sein de la scène ésotérique et occultiste de son époque, ce livre n’est pas qu’un ouvrage sur le personnage, c’est aussi une contribution à la compréhension des évolutions, des réussites et des crises qui justifient cette scène si sensible aux contextes historiques et culturels traversés. C’est aussi, pour ceux qui savent la nature des voies initiatiques, une opportunité de saisir quelques parcours, certes sinueux, déroutants parfois, mais finalement porteurs d’accomplissement.
Serge Caillet cherche et réussit à clarifier certains moments, certains choix, la nature de certains dépôts, le rôle des uns ou des autres, concernant le martinisme du siècle dernier, la résurgence de l’Ordre des Chevaliers maçons élus coëns de l’univers, la Rose-Croix d’Orient, l’Ordre Kabbalistique de la Rose-Croix, l’Eglise gnostique, et bien sûr les rites maçonniques de Memphis et Misraïm. Il prolonge ainsi son remarquable travail sur Les Sârs de la Rose-Croix, publié en 2022 chez le même éditeur et nous permet de mieux comprendre une actualité initiatique et ésotérique certes discrète mais prégnante.